France - Proposition de Loi pour une nouvelle politique migratoire - 7/7/17

Loi d’orientation et de programmation pour l’accueil des migrants humanitaires et pour une politique nationale d’intégration

Texte intégral 20170710 proposition de loi pour une politique d accueil et d integration des migrants anne hidalgo20170710 proposition de loi pour une politique d accueil et d integration des migrants anne hidalgo

 

Proposition dans la perspective d’une

Loi d’orientation et de programmation pour l’accueil des migrants humanitaires et pour une politique nationale d’intégration 

Exposé des motifs

Les urgences géopolitiques, climatiques, la résurgence de conflits d’une grande violence, ont généré ces dernières années des migrations d’une ampleur nouvelle, inédite, qui placent l’Europe et la France devant un défi considérable. La fréquence et l’ampleur des arrivées ne se démentent pas ; ceux qui s’y engagent le font au péril de leur vie, en Méditerranée, ces six derniers mois, deux mille personnes ont péri ou sont portées disparues.

Face à cette crise, la France a su rester fidèle à ses traditions d’accueil, d’asile et de solidarité avec nos partenaires européens. En 2016, plus de 36 000 personnes ont obtenu une protection internationale (statut de réfugié ou protection subsidiaire) en France, le chiffre le plus élevé qu’ait jamais connu notre pays. Dans le cadre du mécanisme de relocalisation décidé par le Conseil de l’Union européenne en septembre 2015, la France s’est également engagée à accueillir 30 700 demandeurs d’asile en provenance d’Italie et de Grèce. Des officiers de protection français sont présents aux côtés de ces pays qui sont en première ligne dans l’accueil des migrants. De façon plus structurelle encore, le dispositif national d’accueil au sens large comporte près de 80 000 places, dont près de 40 000 places en CADA. Depuis 2015, près de 10 000 places en centre d’accueil et d’orientation ont été créées pour garantir des conditions dignes d’hébergement à ceux qui en ont besoin, et engager avec eux les actions d’intégration nécessaires. Les services de l’État et des collectivités, les associations et les citoyens se sont mobilisés sur tout le territoire.

Pourtant, malgré les efforts engagés, la situation actuelle reste celle d’une forte crise, qui génère une grande tension sur les dispositifs existants. La reconstitution régulière de campements de migrants, notamment à la frontière franco-italienne, en Île-de-France et dans le Calaisis, suscite à juste titre l’émotion de nos concitoyens et contribue au sentiment d’une certaine impuissance à assurer l’accueil des migrants humanitaires dans des conditions dignes. L’exercice du droit d’asile et, plus généralement, l’accueil dans des conditions décentes, touchent aux valeurs fondamentales de la République. Si le droit au séjour et le droit d’asile sont le cadre dans lequel chaque situation doit être examinée, nous devons aussi être animés d’une exigence de fraternité envers des personnes dont le parcours migratoire est un traumatisme considérable. Aussi, l’action publique doit se donner les moyens de répondre à cette exigence, et dépasser ses contradictions actuelles.

Au-delà de la crise, c’est la faiblesse structurelle de notre politique d’intégration qui est en cause. Comme l’ont montré les travaux récents de l’INED et de l’OCDE, notre pays est parmi ceux dont les immigrés et les enfants d’immigrés rencontrent le plus de difficultés sur le marché de l’emploi ou dans le système éducatif. En dehors de l’accueil des étrangers primoarrivants, qui se matérialise par la signature du contrat d’intégration républicaine, et de la lutte contre les discriminations, la France ne mène plus une politique globale et cohérente d’intégration, agissant sur l’ensemble des leviers de celle-ci, que sont notamment l’emploi, le logement, l’éducation et la culture, tout au long du parcours des immigrés et de leurs enfants. L’accueil, à l’arrivée sur le territoire, en est la première étape, mais certainement pas la seule : c’est une action durable qu’il nous faut déployer.

Tout se tient : c’est parce que notre politique d’intégration est faible que nous peinons à faire face à la crise. C’est ainsi par exemple que les Centres d’Accueil pour Demandeurs d’Asile continuent d’accueillir en leur sein de trop nombreux réfugiés statutaires, parce que trop peu est fait pour faciliter leur accès à l’emploi et au logement ordinaire ; ceci empêche les CADA nouveaux d’accueillir les demandeurs d’asile et contraint à recourir de manière coûteuse et inadaptée à des solutions d’urgence. Plus largement, c’est parce que nous n’avons pas confiance en notre capacité d’intégration que nous peinons à définir une politique cohérente et assumée de réponse à la crise humanitaire.

C’est donc d’un projet global, cohérent et ambitieux, dont la France doit pouvoir se doter. L’objet de ce texte est d’en jeter les premières bases, afin d’ouvrir le débat et de s’enrichir des contributions de chacun, tant cet enjeu appelle l’implication de tous les républicains, quelle que soit leur appartenance politique.

Cette ambition engage aussi bien l’État que les collectivités locales, les associations, les citoyens et les migrants humanitaires eux-mêmes.

Au-delà, l’amélioration de ces conditions d’accueil et d’intégration appelle des évolutions significatives du cadre réglementaire européen, qu’il s’agisse de l’harmonisation par le haut des critères d’accès aux titres de séjour pour les demandeurs d’asile, de la répartition de leur accueil entre les États membres, ou encore de l’adaptation des procédures à l’ampleur constatée des flux migratoires dans les pays de l’Union les plus concernés par ce phénomène.

Pour autant, cette nécessaire évolution du droit européen ne saurait justifier l’ajournement des nécessaires évolutions de notre dispositif national d’accueil et d’intégration. Ces deux chantiers, européen et national, doivent être menés simultanément.

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